Depuis un an, en Iran, tout a changé. Le mouvement de contestation, né à la suite de la mort en garde à vue, pour un voile mal ajusté, de Mahsa (Jina) Amini, Iranienne d’origine kurde de 22 ans, le 16 septembre 2022, a bouleversé l’ordre édicté par le pouvoir. Certes, le carcan du régime est toujours aussi oppressant, mais, depuis un an, les femmes osent plus qu’autrefois ôter leur voile, obligatoire dans le pays depuis la révolution islamique de 1979. Un symbole d’émancipation dont les hommes se montrent de plus en plus solidaires. Ils interviennent plus volontiers lorsque les femmes sont harcelées ou intimidées. Par solidarité, certains sortent même dans la rue en short, lui aussi interdit en Iran.
A l’heure où les frontières du pays restent aujourd’hui encore closes pour les médias étrangers, notamment la presse écrite, la série de photographies « Femme, vie, liberté » – le triptyque devenu le cri de ralliement de la contestation en Iran – réalisée par Siamak Amiri revêt une importance inouïe. S’y entremêlent approches personnelle et journalistique. Toutes les images ont été prises entre les mois de mars et d’août 2023. Elles montrent des jeunes femmes ayant participé aux manifestations, les cheveux au vent, parfois même teints, fumant, discutant avec des amies, portant des tee-shirts de groupes de metal, arborant des tatouages… Une liberté qui, en Iran, traduit un grand courage et la volonté de se battre.
Certaines laissent apparaître leur visage, quand d’autres, pour des raisons de sécurité, détournent la tête. Surtout, le photographe les a saisies dans l’espace public, ce qu’il n’avait pas fait lors de la mobilisation, inquiet de la répression policière. Mais il n’a jamais pu se résoudre à signer des images qui ne seraient pas celles de la rue. « La vie, l’audace, la résistance, la vraie lutte se passaient dehors. Toutes les idées qui traversaient l’esprit pour un projet hors de ce cadre me semblaient faibles et sans signification », explique-t-il.
Le temps de la résistance
L’Iranien a commencé sa série une fois les manifestations réprimées, au moment où « la résistance est entrée dans une nouvelle phase », selon lui. « Si un écroulement du système politique en place n’est pas à l’ordre du jour, nous sommes en plein milieu d’une révolution sociale », analyse-t-il.
Chaque image raconte un aspect des changements profonds en cours dans la société iranienne : des femmes sans voile, prêtes à payer le prix fort pour s’élever contre cette discrimination, d’autres s’érigeant contre la misogynie au sein de leur propre famille, des parents enfin solidaires de leurs enfants aspirant à une vie plus libre… Tant de nouveautés qui ne touchent pas seulement la capitale, Téhéran, mais aussi d’autres villes, y compris la plus conservatrice, Ispahan, au centre du pays.
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