le terrorisme apocalyptique de l’organisation Etat islamique

le terrorisme apocalyptique de l’organisation Etat islamique

« Rendez-vous à Dabiq. La théologie apocalyptique du groupe “Etat islamique” », d’Othman El Kachtoul, préface de Dominique Avon, Karthala/IISMM, « Terres et gens d’Islam », 400 p., 35 €.

Le 29 juin 2014, l’organisation Etat islamique (EI) annonce ce qu’elle présente comme la réalisation du « rêve de tout musulman » et du « souhait de tout djihadiste » : l’établissement d’un « califat » dans les régions qu’elle a conquises en Irak et en Syrie. Apparaît au même moment sur Internet un nouvel outil de propagande du groupe islamiste, le magazine en anglais Dabiq, qui paraîtra jusqu’à l’été 2016.

Il porte le nom d’un village syrien de moins de 5 000 habitants, près de la frontière turque, pas encore conquis par l’organisation – il le sera en août –, alors que celle-ci détient des villes importantes comme Mossoul, en Irak, et Rakka, en Syrie. Mais Dabiq, réalité géopolitique dérisoire, est en revanche central dans une autre dimension, celle où l’EI veut d’emblée installer son prétendu califat : le temps de l’apocalypse. Car la bourgade, selon le magazine, doit être le théâtre de l’ultime affrontement entre musulmans et « croisés », qui annoncera l’avènement de la justice divine – « on appelle parfois » cette bataille, précise l’auteur anonyme, « Armageddon ».

Sur cette « théologie apocalyp­tique » de l’EI, l’islamologue et ­diplomate français Othman El Kachtoul réunit, dans un livre issu de sa thèse, Rendez-vous à Dabiq, le dossier le plus complet à ce jour, qui permet d’en comprendre les origines, les structures, la portée et, d’abord, l’importance qu’elle revêt pour les cadres et les adeptes de l’organisation. Bien connue en tant qu’élément récurrent de la propagande de l’EI, elle a le plus souvent été minimisée, réduite, justement, à une rhétorique propagandiste, où la religion serait un prétexte. Un apport significatif du livre est de compliquer cette vision.

Un trait caractéristique

Il n’est certes pas possible de définir le degré d’adhésion réel des membres de l’organisation à cette théologie, ni la part qu’elle occupe dans les motivations de ceux qui l’avaient rejointe en Irak et en ­Syrie ou agissent aujourd’hui encore en son nom dans le reste du monde, tels les terroristes d’Arras et de Bruxelles. Oui, mais, voilà, elle est présente, et il n’est pas possible non plus de la nier, surtout quand, comme ce livre le ­permet, on prend la mesure de sa constante et cohérente réitération. D’autant qu’elle constitue un trait caractéristique de l’EI, seul mouvement djihadiste à la mobiliser d’une manière à ce point systématique.

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